Les insectes ont-ils la notion du temps ?

On sait que de plus en plus d’animaux, comme les humains, sont capables d’estimer le temps qui passe. Sans l’aide mécanique d’une montre, c’est bien sûr subjectif, mais même si la manière dont nous percevons le temps est imprécise, nos estimations sont suffisantes pour nous guider lorsque nous prenons des décisions.

La plupart des recherches scientifiques sur le sujet se sont focalisées sur les cycles réguliers dus aux alternances entre le jour et la nuit par exemple, c’est ce que l’on appelle des cycles circadiens [1]. Les cycles circadiens sont généralement assez faciles à comprendre et à étudier, parce que la baisse de luminosité la nuit permet à de nombreux animaux de marquer la fin d’un cycle de manière assez précise avec un repère fixe. Et dans un laboratoire, les cycles jours/nuits peuvent être contrôlés avec des lumières artificielles pour changer leur durée et étudier comment les animaux s’y adaptent. Mais de nombreux animaux peuvent aussi chronométrer des évènements plus courts, de quelques seconds ou quelques minutes. La capacité à percevoir des temps courts à été très peu étudiée, mais une étude parue en 2020 résume l’était des connaissances sur la perception du temps par les animaux [2], alors voici un résumé des découvertes qui concernent les insectes :

La plupart des insectes, comme les abeilles [3], ont des cycles circadiens jour/nuit très marqués. Le chronométrage des évènements courts chez les insectes a été moins étudié, mais on sait notamment que les abeilles sociales [4] et les bourdons [5] sont capables de mesurer des intervalles de temps court.

Plus que cela, il a d’ailleurs été démontré que les bourdons sont capables d’ajuster la vitesse à laquelle il prennent des décisions en fonction du danger auquel ils sont exposés [6]. Du côté des abeilles, ont sait que les ouvrières sont capables de mesurer des durées courtes : en effet, lorsqu’une abeille revient au nid après avoir trouvé une source de nourriture, elle effectue une danse en cercle. Les autres abeilles observent cette danse et sont capables de mesurer la durée de la danse qui correspond à la distance entre la ruche et les fleurs [7] ! Enfin, il est connu que de petites guêpes parasites d’oeufs de papillons sont capables de mesurer le temps qu’elles passent à marcher sur les oeufs des papillons pour estimer leur taille [8] !

Très peu d’examples existent donc à jour, mais ils sont difficiles à étudier et il semble probable que de très nombreux insectes soit capables d’estimer le temps qui passe. Parce que si peu d’insectes ont été identifiés comme étant capables jusqu’à présent d’estimer le temps, les mécanismes qui permettent d’expliquer le fonctionnement de la mesure du temps sont forcément très débattus entre les scientifiques. Les théories les plus populaires sont assez compliquées, au point que je dois malheureusement vous renvoyer vers un article en anglais [9], de peur de les expliquer de manière inexacte.


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Notes et références

[1Mulder, C. K., Gerkema, M. P., & Van Der Zee, E. A. (2013). Circadian clocks and memory : time-place learning. Frontiers in molecular neuroscience, 6, 8.

[2Ng, L., Garcia, J. E., Dyer, A. G., & Stuart-Fox, D. (2020). The ecological significance of time sense in animals. Biological Reviews.

[3Shemesh, Y., Cohen, M., & Bloch, G. (2007). Natural plasticity in circadian rhythms is mediated by reorganization in the molecular clockwork in honeybees. The FASEB Journal, 21(10), 2304-2311.

[4Craig, D. P. A., Varnon, C. A., Sokolowski, M. B., Wells, H., & Abramson, C. I. (2014). An assessment of fixed interval timing in free-flying honey bees (Apis mellifera ligustica) : An analysis of individual performance. PLoS One, 9(7), e101262.

[5Boisvert, M. J., & Sherry, D. F. (2006). Interval timing by an invertebrate, the bumble bee Bombus impatiens. Current biology, 16(16), 1636-1640.

[6Wang, M. Y., Chittka, L., & Ings, T. C. (2018). Bumblebees express consistent, but flexible, speed-accuracy tactics under different levels of predation threat. Frontiers in psychology, 9, 1601.

[7Seeley, T. D., Mikheyev, A. S., & Pagano, G. J. (2000). Dancing bees tune both duration and rate of waggle-run production in relation to nectar-source profitability. Journal of Comparative Physiology A, 186(9), 813-819.

[8Parent, J. P., Brodeur, J., & Boivin, G. (2016). Use of time in a decision-making process by a parasitoid. Ecological Entomology, 41(6), 727-732.

[9Voir section III Mechanisms of Interval Timing de Ng, L., Garcia, J. E., Dyer, A. G., & Stuart-Fox, D. (2020). The ecological significance of time sense in animals. Biological Reviews.



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