Les Calopteryx : des libellules à ailes noires

Les libellules du genre Calopteryx ont les ailes repliées verticalement au-dessus de leur abdomen au repos, et ont des yeux très écartés. Elles appartiennent donc au sous-ordre des Zygoptères et sont donc des demoiselles. Chez les Calopteryx, les mâles possèdent des ailes fumées et colorées d’un bleu sombre à reflets métallisés ce qui permet de les différencier très facilement des autres espèces de demoiselles comme par exemple les Agrion, qui ont généralement des ailes entièrement translucides. Sur la macrophotographie ci-dessous, on peut voir un Calopteryx splendens.

Habitat

Les Calopteryx apprécient les cours d’eau et les zones humides comme les rivières aux eaux en mouvement mais relativement calmes, avec une végétation abondante sur les berges et dans l’eau [1]. Les larves se trouvent dans les zones de faibles courant généralement dans la végétation. Les larves montent sur la végétation et se perchent sur tout les perchoirs disponibles pour chasser [1].

Reproduction et cycle de vie des demoiselles Calopteryx

Les Calopteryx se reproduisent généralement en été. Durant l’accouplement, les mâles s’accrochent aux femelles à l’aide des forcipules visibles au bout de leur abdomen. La femelle une fois fécondée dépose ensuite environs 300 œufs sur des plantes flottantes ou dépassant de l’eau comme les joncs ou des nénuphars. Les œufs éclosent après environ deux semaines. Comme toutes les larves de libellules et de demoiselles, elles sont carnivores et chassent à l’affut pour attraper toute sorte d’insectes et autres invertébrés aquatiques comme les larves d’éphémères, les larves de moustiques, les vers de vase ou les daphnies. Leur développement est assez lent et des larves de différents âges peuvent être observées en même temps à un même endroit, mais ne se mangent pas entre elles [1]. Au printemps, les larves sortent de l’eau et s’agrippent aux plantes pour effectuer leur métamorphose en demoiselle adulte.

Il existe 4 espèces de Calopteryx en France. Les plus courantes sont le Caloptéryx vierge Calopteryx virgo, et le Caloptéryx éclatant Calopteryx splendens. Ces deux espèces sont occasionnellement trouvées ensemble sur un même cours d’eau généralement quand l’habitat change rapidement, c’est-à-dire lorsqu’il y a une zone ensoleillée et une zone ouverte ombragée et abritée côte à côte [2]. On rencontre aussi plus rarement le Caloptéryx méditerranéen Calopteryx haemorrhoidalis et le Caloptéryx occitan Calopteryx xanthostoma. L’identification n’est pas évidente et se fait principalement sur la coloration des ailes, et la distribution qui varie entre espèces peut aider à les identifier [3] :

• Le Caloptéryx vierge Calopteryx virgo : Cette demoiselle préfère un débit d’eau plus rapide, une plus grande tolérance à l’acidité et un niveau d’oxygénation plus élevé [2]. Le caloptéryx vierge est très commun et présent dans toute la France et dans toute l’Europe, du Nord au Sud et de l’Ouest à l’Est jusqu’en Russie et en Turquie. Les ailes des mâles sont entièrement colorées, apparaissant bleues ou vertes métalliques en fonction de l’angle de la lumière.
• Le Caloptéryx éclatant Calopteryx splendens préfère des habitats plus ouverts, avec moins d’arbres, des eaux plus lentes et a une plus grande tolérance à l’alcalinité [2]. Cette espèce est présente dans toute la France. En Europe on la retrouve presque partout à l’exception de la partie Nord de la Suède et de la Norvège et de l’Espagne. Elle s’étend de l’Ouest à l’Est jusqu’en Asie. La base et l’apex des ailes des mâles sont translucides, alors que la partie au milieu est colorée en bleu ou vert métallique.
• Le Caloptéryx méditerranéen Calopteryx haemorrhoidalis : Ce Calopteryx préfère les eaux vives [4]. Cette espèce est présente dans le Sud de la France et dans les pays du Sud-Ouest de l’Europe dont l’Italie et l’Espagne, ainsi qu’en Afrique du Nord en Algérie, Tunisie et au Maroc. Les ailes des mâles sont presque entièrement colorées à l’exception de la base qui est fumée de brun mais translucide. Ils ont une couleur tirant sur le brun, avec des reflets moins éclatants et moins métalliques. Leur corps est parfois rosâtre.
• Le Caloptéryx occitan Calopteryx xanthostoma : Cette demoiselle préfère également les eaux vives [3]. On le retrouve dans la moitié Sud de la France et en Espagne, avec quelques observations sur la partie Nord-Ouest de l’Italie à la frontière française. La moitié supérieur des ailes des mâles est entièrement bleue jusqu’à l’apex, mais la moitié basale est entièrement translucide.

Prédateurs et menaces

Les principaux prédateurs des Calopteryx sont les oiseaux [5], les amphibiens tels que les grenouilles vertes et les araignées d’eau ou araignées patineuses (Dolomedes sp.) [6]. Les menaces d’origines humaines sur les Calopteryx sont la pollution de l’eau par les rejets des eaux usagées de ville, le ruissellement des nutriments et insecticides des champs, les pollutions industrielles. Pour les espèces favorisant les zones abritées à forte végétation, la canalisation des cours d’eau avec la bétonisation des berges, le creusement des cours d’eau qui augmente le débit, et la déforestation qui retire les habitats et conduits au réchauffement des ruisseaux et rivières.

[1] Ilmonen, J., & Suhonen, J. (2006). Intraguild predation, cannibalism, and microhabitat use in Calopteryx virgo and Somatochlora metallica larvae : a laboratory experiment. Aquatic Ecology, 40, 59-68.

[2] Goodyear, K. G. (2000). A comparison of the environmental requirements of larvae of the Banded Demoiselle Calopteryx splendens (Harris) and the Beautiful Demoiselle C. virgo (L.). Journal of the British Dragonfly Society, 16(2), 33-51.

[3] Données iNaturalist du 31/03/2024.

[4] Gibbons, D. W., & Pain, D. (1992). The influence of river flow rate on the breeding behaviour of Calopteryx damselflies. Journal of Animal Ecology, 283-289.

[5] Lambert, C. L. (1994). The influence of larval density on larval growth, and the consequences for adult survival and reproductive success in the damselfly Calopteryx virgo (Odonata) (Doctoral dissertation, University of Plymouth).

[6] Hilfert-Rüppell, D. (1999). To stay or not to stay : decision-making during territorial behaviour of Calopteryx haemorrhoidalis and Calopteryx splendens splendens (Zygoptera : Calopterygidae). International Journal of Odonatology, 2(2), 167-175.