Publié le 3 juillet 2025 et mis à jour le 4 juillet 2025.

Comment les varroas s’orientent dans la ruche

Qu’est-ce qui attire les varroas ?


Le Varroa destructor est un acarien parasite responsable de lourdes pertes dans les colonies d’abeilles. Ce minuscule ennemi perçoit les odeurs, la chaleur, les vibrations et même la lumière sans posséder d’yeux. Il cible surtout les larves d’abeilles mâles au dernier stade de développement. Difficile à détecter car il se cache sous l’abdomen des abeilles, le varroa affaiblit les colonies en se nourrissant des larves d’abeilles et en leur transmettant des virus. Les traitements chimiques contre le varroa sont souvent imparfaits, laissant des résidus et favorisant des résistances. Comprendre en détail comment le varroa s’oriente, ce qui l’attire et comment il choisit son hôte est une étape cruciale pour développer de nouvelles méthodes naturelles et efficaces de lutte. Voici comment cet acarien destructeur s’oriente dans une ruche.


Les Varroa destructor ou varroas sont des acariens parasites de l’abeille. Ils sont l’une des menaces principales qui pèsent sur l’apiculture, avec les pesticides, le manque de fleurs et le changement climatique. Pour cette raison, les scientifiques s’intéressent de près à leur biologie.

On sait qu’ils se nourrissent des corps gras des abeilles, et ils existent quelques méthodes, toutes imparfaites, pour les contrôler avec ou sans produits chimiques. Les traitements chimiques contre le varroa causent cependant aussi des effets néfastes aux abeilles, laissent des résidus dans les ruches, et les varroas deviennent parfois résistants à ces traitements. Les traitements anti-varroas physiques ou mécaniques sont eux moins développés et nécessitent souvent du matériel apicole spécialisé, ou demandent trop d’efforts pour être mis en place à grande échelle.

Il existe beaucoup, beaucoup de connaissances sur le varroa, mais aussi toujours quelques zones d’ombres qui empêchent d’améliorer les traitements existants. Une des questions de la biologie des varroas qui a été un peu moins explorée est celle du mouvement des varroas dans la ruche. Comment s’orientent, se repèrent et se déplacent-ils ? Déterminer cela est très difficile car les varroas se cachent souvent sous les larves d’abeilles, dans les alvéoles operculées, ou sous l’abdomen des ouvrières adultes. Cependant, comprendre ce qui les motive, les attire et comment ils s’orientent pourrait être très utile pour développer de nouvelles méthodes de contrôle de ce parasite.

Comment le Varroa destructor perçoit-il son environnement ?

Les Varroa destructor sont des acariens qui possèdent 4 paires de pattes (huit pattes au total) ainsi que plusieurs pièces buccales dont certaines sont assez similaires aux crochets des araignées. Le corps entier des varroas, y compris les pattes et pièces buccales, sont recouverts de poils dont certains perçoivent les mouvements (ce sont des poils mécanorécepteurs) [1].

Les varroas peuvent aussi sentir les odeurs, la chaleur, et les courants d’air. Leurs deux pattes avant fonctionnent un peu comme les antennes des insectes : ils s’en servent peu pour marcher, mais les lèvent le plus souvent en l’air. Ces pattes avant sont pourvues de poils sensitifs qui leurs permettent probablement d’identifier des odeurs et températures [1]. Les varroas sont aussi très sensibles aux mouvements d’air et leur font face, probablement pour mieux sentir les odeurs qu’ils cherchent et pouvoir les suivre [2] [3].

Les varroas ont aussi probablement le sens du goût car ils possèdent des poils sensitifs au bout des palpes de leur bouche [1].

Les varroas ont-ils des yeux ?

Les varroas ne possèdent pas d’yeux. Des études ont toutefois montré qu’ils peuvent percevoir la luminosité. Un des mécanismes possibles pour percevoir la lumière sans yeux est la présence de cellules sensibles à la lumière. Chez les varroas, ces cellules sont probablement des cellules de leur cerveau. Celui-ci est protégé sous la très fine cuticule orangée des varroas, qui est légèrement translucide [4].

Que cherchent les varroas dans une ruche ?

Dans une ruche, les varroas cherchent avant tout à se nourrir et à se reproduire. Pour se reproduire, ils doivent trouver une cellule contenant une larve d’abeille au dernier stade de développement avant la nymphose. Les femelles varroas se nourrissent aussi des larves d’abeilles sur lesquelles elles pondent leurs oeufs. Celles qui viennent d’émerger d’une cellule cherchent à se nourrir sur une ouvrière nourrice. Si les varroas ne trouvent pas ce qu’ils cherchent dans la ruche, ils cherchent à se faire transporter vers une nouvelle ruche.

La plupart du temps, les varroas se cachent sous l’abdomen des abeilles, partiellement coincés entre les sternites des abeilles, c’est à dire les plaques qui protègent le dessous de leur abdomen [5]. Pour les varroas, une des décision majeure au cours de leur vie est de déterminer s’ils doivent sortir de cette cachette pour infester une cellule de larve ou changer d’abeille hôte [6]. De nombreux scientifiques ont donc essayé de déterminer les conditions qui encouragent les varroas à se détacher de leur hôte pour entrer dans une cellule contenant une larve.

Qu’est-ce qui attire les varroas ?

Le principal signal auquel les varroas répondent est lié au stade de développement des larves d’abeilles et à leur sexe. Les varroas ne parasitent que les larves d’abeilles au 5ème stade de leur développement larvaire. Ce stade est le dernier stade avant que les abeilles n’operculent la cellule et avant la nymphose. Les larves d’abeilles au cinquième stade produisent des odeurs que les varroas peuvent identifier [7] [2]. Les larves d’abeilles mâles (parfois appelés "faux-bourdons") produisent ces odeurs en plus grande quantité et pendant plus longtemps, entre 40 et 50h, contre 15 à 20h pour les larves d’ouvrières. En plus, les larves de mâles sont plus grandes et nourries plus souvent, ce qui augmente les chances qu’un varroa les trouve. Les larves de reines, au contraire, sont moins souvent parasitées, et la gelée royale qui leur est donnée semble avoir un effet répulsif sur les varroas [8].

De nombreux scientifiques se sont aussi demandés quelles étaient les températures préférées des varroas dans une ruche. Les études diffèrent un peu dans leurs conclusions, mais s’accordent à dire que les varroas préfèrent une température un peu plus basse que les abeilles, de 26 à 32,6°C [9] [10]. Les abeilles préfèrent garder leur couvain autour de 34,5°C. Chez l’abeille asiatique Apis cerana, le premier hôte de Varroa destructor, les varroas se reproduisent exclusivement sur le couvain de faux bourdon qui est gardé entre 30 et 34°C ce qui est 0,4°C plus froid que le couvain de faux-bourdons d’Apis mellifera [11].


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Notes et références

[1Dillier, F. X., Fluri, P., & Imdorf, A. (2006). Review of the orientation behaviour in the bee parasitic mite Varroa destructor : sensory equipment and cell invasion behaviour. Revue suisse de zoologie, 113(4), 857-878.

[2Rickli, M., Guerin, P. M., & Diehl, P. A. (1992). Palmitic acid released from honeybee worker larvae attracts the parasitic mite Varroa jacobsoni on a servosphere.

[3Kuenen, L. P. S., & Calderone, N. W. (1998). Positive anemotaxis by Varroa mites : responses to bee odour plumes and single clean‐air puffs. Physiological Entomology, 23(3), 255-264.

[4Kirchner, W. H. (1993). 15. Lichtsinn und Vibrationssinn der Varroa-Milbe. Apidologie, 24(5), 490-492.

[5Ramsey, S. D., Ochoa, R., Bauchan, G., Gulbronson, C., Mowery, J. D., Cohen, A., ... & vanEngelsdorp, D. (2019). Varroa destructor feeds primarily on honey bee fat body tissue and not hemolymph. Proceedings of the National Academy of Sciences, 116(5), 1792-1801.

[6Boot, W. J., Beetsma, J., & Calis, J. N. (1994). Behaviour of Varroa mites invading honey bee brood cells. Experimental & applied acarology, 18, 371-379.

[7Principalement l’acide palmitique.

[8Le Conte, Y. (1990). Contribution à l’étude des relations abeille-varroa : approches comportementale, chimique, et genetique (Doctoral dissertation, Paris 11).

[9Rosenkranz, P. (1988). Temperaturpräferenz der Varroa-Milbe und Stocktemperaturen in Bienenvölkern an Tropenstandorten (Acarina : Varroidae/Hymenoptera : Apidae). Entomologia generalis, 14(2), 123-132.

[10Le Conte, Y., & Arnold, G. (1988). Étude du thermopreferendum de Varroa jacobsoni Oud. Apidologie, 19(2), 155-164.

[11Kraus, B., Velthuis, H. H., & Tingek, S. (1998). Temperature profiles of the brood nests of Apis cerana and Apis mellifera colonies and their relation to varroosis. Journal of apicultural research, 37(3), 175-181.



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