La Bruche du Pois : petit coléoptère, grands dégâts

La bruche du pois (Bruchus pisorum) est un coléoptère ravageur qui cible uniquement les cultures de pois, causant des dommages importants aux récoltes et présentant un défi majeur pour les agriculteurs du monde entier. Cet insecte est parfois improprement appelé charançon du pois alors qu’il s’agit en fait d’une chrysomèle. La bruche du pois, bien que de taille modeste, a la capacité de causer des économiques importantes pour les producteurs de pois destinés à la consommation humaine et des dégâts dans les jardins potagers des amateurs de petits pois.

Comment reconnaître la bruche du pois ?

La bruche du pois est un coléoptère appartenant à la famille des Chrysomelidae ou chrysomèles. Les chrysomèles ont de longues antennes faites de petits segments qui ressemblent un peu a des colliers de perles. Les chrysomèles sont très diversifiées et certaines espèces sont remarquables, comme par exemple les méloés.

La bruche est un petit coléoptère de 4 à 7 mm de long avec des pattes tachetées de noir, une tâche blanche au centre de l’avant du thorax (le prothorax), ainsi qu’une ligne oblique blanche sur les élytres (qui cachent les ailes) et deux taches noires sur la partie de l’abdomen qui dépasse des élytres [1]. La larve de la bruche est blanche avec une tête brune et n’a pas de pattes.

La bruche du pois peut être confondue avec la bruche des fèves (Bruchus rufimanus), mais cette dernière à des pattes avant en partie rouges.

Quel est le cycle de vie de la bruche du pois ?

Le cycle de vie de la bruche du pois comprend quatre stades : l’œuf, la larve, la pupe et l’adulte.

Les adultes émergent au printemps et sont attirés par l’odeur des plantes de pois. Les femelles pondent leurs œufs sur les gousses de pois, ils sont allongés (0,6 x 1,5 mm) et de couleur blanc crème. Les larves à peine sorties de l’oeuf rentrent dans les cosses et se développent et se nourrissent des graines de pois. Elles creusent un trou circulaire dans lequel elles s’abritent. Après avoir achevé leur développement larvaire, les larves se transforment en pupes dans les graines et émergent sous forme d’adultes et se cachent dans la végétation environnante. Les bruches recommencent leur cycle de vie au printemps et ne font qu’une seule génération par an.

Habitudes Alimentaires et Dommages

Les bruches adultes se nourrissent de pollen et peuvent endommager les fleurs.

Les larves de la bruche du pois se nourrissent exclusivement de graines de pois. Les pois (Pisum spp.) regroupent les petits pois, les poids cassés, les pois mangetout, les pois croquetout, les pois fourragers et les pois protéagineux. Une fois que les larves pénètrent dans les gousses de n’importe lequel de ces pois, elles grignotent les graines, les rendant impropres à la consommation humaine et de moindre valeur pour la consommation animale. Elles creusent généralement un trou circulaire de 2 à 3mm dans les pois dans lesquelles elles finissent leur développement [2]. Ces dommages réduisent considérablement la qualité et la quantité de la récolte. Les pois destinés à la consommation humaine ne peuvent plus être vendus, ceux destinés à l’alimentation animal sont produits en moindre quantité et qualité [3]. Les dégâts causés par la bruche du pois peuvent être particulièrement dévastateurs dans les régions où les pois sont cultivés comme une source importante de protéines alimentaires. Les pertes économiques résultant de ces dommages peuvent être significatives, jusqu’à 50% de la production [4], ce qui affecte la sécurité alimentaire mondiale et les revenus des agriculteurs.

Prévention et Lutte

La gestion de la bruche du pois nécessite de combiner différentes méthodes de prévention et de lutte. La lutte contre la bruche doit se faire à large échelle car ces insectes sont capables de voler sur plusieurs centaines de mètres et détectent très facilement les plants de pois. Voici quelques stratégies utilisées pour minimiser les dommages causés par cet insecte ravageur :

• La rotation des cultures : Alterner les cultures, en évitant de planter des pois sur la même parcelle ou sur des parcelles proches plusieurs années de suite peut réduire les populations de bruches du pois. Les bruches se cachent durant l’hiver dans les restes de plants ou de cosses de pois et dans la végétation environnante. En déplaçant les parcelles de pois d’une année sur l’autre, il est donc plus difficile pour les bruches de trouver rapidement des plantations de pois au printemps. Il faut bien détruire tous les restes de plants, de cosses et de graines pour éviter qu’ils ne servent de refuges à des bruches adultes durant l’hiver.

• L’utilisation de variétés résistantes : Le développement de variétés de pois résistantes à la bruche peut contribuer à réduire l’impact de cet insecte ravageur sur les récoltes. Peu de variétés résistantes existent à ce jour mais de nombreux chercheurs essaient de développer des variétés de pois que la bruche ne peut pas repérer ou dans lesquelles ses larves ne parviennent pas à se développer [5].

• La lutte biologique : plusieurs guêpes parasites de la bruche du pois sont connues, comme Triaspis thoracicus, Eupteromalus leguminis, Uscana senex, Trichogramma spp. [6]. Jusqu’à maintenant, ces agents de lutte biologique ne sont pas ou plus élevés à grande échelle pour le traitement des bruches du pois. Cependant, au fur et à mesure que la recherche dans le domaine de la lutte contre la bruche du pois progresse, il est possible que ces guêpes puissent à terme être élevées pour traiter des champs entiers de pois.

• La plantation et la récolte précoce : certaines variétés de pois peuvent être plantées de manière précoce. Cela peut permettre aux pois de se former avant que les bruches ne s’activent au printemps. La récolte de ces pois est aussi précoce, ce qui permet de minimiser les dégâts causés par les bruches. Et celles-ci, incapables de finir leur développement avant la récolte, sont moins susceptibles d’endommager les cultures l’année suivante.

• La surveillance et l’utilisation d’insecticides : Les agriculteurs doivent surveiller régulièrement leurs cultures pour détecter les signes d’infestation dès que possible. En cas de grande infestations, l’utilisation d’insecticides peut être considérée, mais elle doit tenir compte des insectes pollinisateurs. Les traitements ne doivent pas être effectués lorsque les abeilles pollinisent les fleurs, ou laisser de résidus dans le nectar et le pollen.

• Stockage adéquat des récoltes : La bruche peut causer des dégâts importants après la récolte dans les silos de stockage. Après la récolte, il est important de stocker les pois dans des conditions appropriées pour éviter l’infestation par la bruche du pois pendant le stockage. Différents traitements peuvent être considérés, comme des traitements à la chaleur, au CO2, ou des traitements insecticides, pour empêcher les larves encore vivantes de finir leur développement. Dans tous les cas, si les pois sont contaminés, il est très important de s’assurer de la destruction des bruches pour éviter la contamination des champs environnant l’année suivante.

  

[1] Identifier la bruche.

[2] Reddy, G. V., Sharma, A., & Gadi, R. L. (2018). Biology, ecology, and management of the pea weevil (Coleoptera : Chrysomelidae). Annals of the Entomological Society of America, 111(4), 161-171.

[3] Nikolova, I. M., & Georgieva, N. (2015). Evaluation of damage caused by Bruchus pisorum L (Coleoptera : Chrysomelidae) on some parameters related to seed quality of pea forage cultivars (Pisum sativum L.). Journal of Central European Agriculture.

[4] Aznar-Fernández, T., & Rubiales, D. (2019). Flower and pod source influence on pea weevil (Bruchus pisorum) oviposition capacity and preference. Frontiers in Plant Science, 491.

[5] Aryamanesh, N., Byrne, O., Hardie, D. C., Khan, T., Siddique, K. H. M., & Yan, G. (2012). Large-scale density-based screening for pea weevil resistance in advanced backcross lines derived from cultivated field pea (Pisum sativum) and Pisum fulvum. Crop and Pasture Science, 63(7), 612-618.

[6] Voir Reddy et al. (2018).