Les soins paternels chez les arthropodes

Comment les insectes mâles s’occupent parfois de leurs bébés

Pour les mâles, aider sa progéniture signifie passer plus de temps à s’occuper d’un petit nombre de descendants et moins de temps à se reproduire. C’est une stratégie viable pour de nombreux mammifères et oiseaux qui vivent longtemps : pas la peine de produire plus de descendants s’ils meurent tous, mieux vaut s’occuper de quelques uns et s’assurer qu’ils atteignent l’âge adulte. Et avec les saisons, sans soins parentaux, la plupart sinon tous les petits pourraient mourir pendant l’hiver. Chez les arthropodes, qui regroupent entre autres les insectes, les araignées et les mille-pattes, les mâles se préoccupent généralement peu de leurs petits. La plupart des espèces d’arthropodes vivent généralement moins d’un an, alors pour eux le calcul est un peu différent. Pourquoi investir la plupart de sa vie à s’occuper de quelques petits alors que l’on peut en produire des centaines et les laisser se débrouiller ?

Il existe quand même de nombreux exemples de soins paternels [1], juste peu en proportion du nombre d’espèces d’arthropodes qui vivent sur terre. Les soins paternels sont donc relativement assez rares chez les arthropodes. Ils sont aussi très peu connus du grand public car plus difficiles à observer.

Une punaise mâle de la famille des Belostomatidae porte les oeufs sur son dos. Chez ces punaises aquatiques, les mâles portent et protègent les oeufs jusqu'à éclosion.
Punaise aquatique mâle portant des oeufs
Kansas Department of Agriculture, Bugwood.org, Creative Commons Attribution-Noncommercial 3.0 License.

On peut séparer les soins paternels en trois grandes catégories chez les invertébrés :

  • Les mâles qui s’occupent des petits avant la naissance
  • Les mâles qui s’occupent avec les femelles des petits après la naissance
  • Les mâles qui s’occupent seuls des petits après la naissance

Les invertébrés mâles qui s’occupent de leurs petits avant la naissance.

Chez les arthropodes, la manière la plus courante pour les mâles de "s’occuper" de leurs petits est d’offrir de la nourriture aux femelles. S’occuper entre guillemets bien sûr, car même si le soin parental avant la naissance est considéré comme soin parental par certains scientifiques, c’est un peu tiré par les cheveux et d’autres scientifiques disent que ce n’est pas un soin parental mais juste un moyen pour les mâles d’attirer les femelles [2]. Mais toujours est-il que les invertébrés mâles font parfois des cadeaux à leur partenaire, sous forme de nourriture, et cette nourriture permet probablement aux femelles de nourrir leurs oeufs ou larves plus facilement. Chez certaines espèces de mille-pattes, d’onychophores ("vers de velour"), de sauterelles, criquets et grillons, de mouches scorpions, de papillons et certaines araignées, les mâles produisent de la nourriture qu’ils donnent aux femelles [3]. D’autres se sacrifient : ce sont eux la nourriture qu’ils offrent aux femelles. C’est le cas bien sûre des mantes, mais aussi de sauterelles, de certaines araignées et de certains moucherons.

Les invertébrés mâles qui s’occupent de leurs descendance conjointement avec les femelles.

Même si peu communs chez les arthropodes, les soins parentaux partagés se retrouvent chez les guêpes potières, les termites (Isoptera), les bousiers (Scarabaeidae) et les coléoptères nécrophages (Silphidae).
Dans ce groupe, les mâles qui en font le moins sont les guêpes potières. Les mâles défendent leurs nids contre les autres mâles de l’espèce, pour pouvoir se reproduire avec le plus de femelles possible. Ce faisant, ils défendent aussi les nids contre les parasites, mais cela est plus un produit secondaire de la défense du territoire sur lequel se trouve leur progéniture qu’un vrai choix parental.

Au contraire, les mâles des bousiers et des coléoptères nécrophages de la famille des Silphidae s’occupent généralement, avec les femelles, de creuser des nids et de ramener de la nourriture aux larves, qu’il s’agisse de bouses ou de carcasses d’animaux en décomposition. Charmant.

Les invertébrés mâles qui s’occupent seuls de leurs petits.

Certains mâles s’occupent seuls de leur descendance, c’est le cas de certaines réduves (punaises assassines du groupe des Reduvidae), de certains opilions (Opiliones) et de certains mille-pattes (Diplopoda), mais principalement chez les punaises d’eau géantes du groupe des Belostomatidae.

Chez ces punaises d’eau douce, les mâles défendent seuls et ardemment les oeufs des femelles contre les parasites et prédateurs. Chez certaines espèces même, les mâles portent les oeufs sur leurs dos.
De la même manière, certains mâles de punaises assassines et d’opilions défendent les oeufs jusqu’à éclosion. C’est aussi le cas chez certains mille-pattes, mais plus souvent simplement parce que les mâles sont territoriaux et que les oeufs se trouvent sur leur territoire.


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Notes et références

[1Zeh, D. W., & Smith, R. L. (1985). Paternal investment by terrestrial arthropods. American Zoologist, 25(3), 785-805.

[2Alexander, R. D., & Borgia, G. (1979). On the origin and basis of the male-female phenomenon. Sexual selection and reproductive competition in insects, 417, 440.

[3Zeh, D. W., & Smith, R. L. (1985). Paternal investment by terrestrial arthropods. American Zoologist, 25(3), 785-805.



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