
Les Ichneumons, famille des Ichneumonidae
Insecta, Hymenoptera, Ichneumonidae
mardi 8 mars 2016 à 11:50 par
Voici une famille de guêpes solitaires parasites particulièrement vaste et complexe tant du point de la taxonomie que des comportements parasitaires. Certains sont capables de détecter leurs hôtes à travers d’épaisses parois et de percer plusieurs centimètres de bois pour pondre leurs larves directement dans le corps du malheureux insecte hôte...
Les guêpes solitaires de la famille des Ichneumonidae sont extrêmement diversifiées. Certains spécialistes estiment qu’il existerait près de 100 000 espèces d’Ichneumonidae [1] dont 25 000 ont déjà été décrites ! Toutes ces espèces sont parasites ou parasitoïdes, et la diversité du groupe se reflète dans la diversité des hôtes. Les Ichneumonidae parasitent en effet des insectes et arachnides très variés : araignées, pseudoscorpions, chenilles, coléoptères, mouches, hyménoptères, trichoptères, neuroptères, raphidioptères, mouche-scorpions,... la plupart des ordres d’insectes peuvent être parasités par des ichneumons [2] [3].
Parmi les Ichneumonidae aux modes de vie les plus bizarres, on trouve ceux parasites des araignées : la femelle ichneumon pond ses oeufs dans le sac d’oeuf d’une araignée, et les larves qui éclosent se fixent au dos des araignées et sucent leur hémolymphe (le sang des insectes) jusqu’à ce que l’araignée de meure d’épuisement. Il existe également un genre d’Ichneumonidae, le genre Agriotypus, chez qui les femelles parasitent les larves des trichoptères qui sont aquatiques. Pour cela, elles s’accrochent solidement à un support en bord d’eau, une pierre ou une tige de plante aquatique par exemple, et rampent jusqu’au fourreau de la larve de trichoptère. Une fois qu’elles ont trouvé une larve d’une espèce de trichoptère hôte, elles percent son fourreau et pondent un oeuf à l’intérieur de celui-ci. La larve d’Ichneumonidae, une fois sortie de l’oeuf, se nourrit de la larve de trichoptère sans la tuer immédiatement. Elle attend d’être presque entièrement développée pour finir de consommer son hôte. Une fois le repas terminé, la larve de l’Agriotypus tisse un bouchon pour rendre le tube étanche et construit un long ruban de soie qu’elle pousse hors de son abri. Ce ruban, long de plusieurs centimètres, possèderait une structure particulière qui permettrait à la larve de remplir le fourreau d’air respirable [4] ! Pour sortir de l’eau et commencer leur vie aérienne, ces étranges guêpes semi-aquatiques se contentent de découper le bouchon du fourreau et de se laisser entrainer par la bulle d’air formée dans leur cocon jusqu’à la surface [5] [6]. Un cycle semi-aquatique similaire est observé chez d’autres ichneumons du genre Tanychela, parasites de chenilles aquatiques de la famille des pyrales [7].
Un autre fait étonnant pour les scientifiques qui étudient cette famille, est d’avoir trouvé une plus grande diversité chez ce groupe en milieu tempéré qu’en milieu tropical. Ce résultat très inhabituel (pour presque tous les groupes animaux et végétaux, la diversité augmente en milieu tropical) a cependant été réfuté [8]. Il provenait certainement du fait que les Ichneumonidae des régions tempérées ont été mieux étudiés que les régions tropicales jusqu’à maintenant.
- Lymantrichneumon disparis [9], un ichneumon orange noir brun et jaune parasite de la chenille du Bombyx disparate (Lymantria dispar), un papillon invasif. Photographié dans la forêt de Ferrières (Seine-et-Marne, Île-de-France) :
- Lymantrichneumon disparis
- Lymantrichneumon disparis
- Lymantrichneumon disparis
- Lymantrichneumon disparis
Vidéo d’un Lymantrichneumon disparis pendant la séance photo (il a ensuite été relâché) :
- Ichneumon crassifemur [10], un Ichneumon noir à pattes rousses et aux antennes annelées dans blanc. Photographié dans la forêt de Ferrières (Seine-et-Marne, Île-de-France) :
- Ichneumon crassifemur
- Ichneumon crassifemur
- Ichneumon crassifemur
- Ichneumon inquinatus [11], une autre guêpe solitaire de la famille des Ichneumonidae. Noir avec des bandes jaunes sur les pattes et un anneau blanc ou jaune sur les antennes. Photographié dans la forêt de Ferrières (Seine-et-Marne, Île-de-France) :
- Ichneumon inquinatus
- Ichneumon inquinatus
- Ichneumon inquinatus
- Polysphincta sp., une guêpe ectoparasite parasite d’araignées. La femelle pond ses oeufs dans le sac d’oeufs de l’araignée, les larves de l’Ichneumonidae se fixent au dos des araignées et prélèvent leur hémolymphe jusqu’à la mort de l’araignée. Elles tissent ensuite un cocon sur la toile de l’araignée. L’individu mort photographié ci-dessous a été récoltée sur une araignée de la famille des Tetragnathidae à Toulouse (Haute-Garonne, Midi-Pyrénées) à l’état de larve, puis élevé et mis en collection :
- Polysphincta parasite d’araignées
- Adulte de larve blanche parasite d’araignées
- Guêpe parasite d’araignée
- Bathytrix fragilis [12], un ichneumonidae de la sous-famille des Cryptinae, parasite de guêpes maçonnes (Eumenidae).
- Bathytrix fragilis
- Bathytrix fragilis
- Bathytrix fragilis
- Perithous sp, un Ichneumonidae de la sous-famille des Pimplinae. On les rencontre souvent sur les abris à insectes où ils inspectent un à un les trous et brindilles creuses. Ils sont à la recherche de logettes d’abeilles solitaires à parasiter. Lorsque les femelles ont repéré la logette d’un hôte potentiel, elles replient leur long ovipositeur sous leur corps : celui-ci est tellement long qu’il dépasse la tête de l’insecte ! Les femelles de ce genre peuvent donc pondre leurs oeufs tout en voyant ou en "sentant" ce qu’elles font avec leurs antennes...
- Perithous sp femelle
- Diphyus sp, un bel insecte jaune orange et noir. Comme on le voit sur cette photo, une fois adultes, les Ichneumonidae ne sont plus parasites mais s’alimentent en nectar et pollen sur les fleurs. Certains Diphyus sont connus pour être parasites de papillons de la famille des Noctuidae [13].
- Diphyus sp
- Diphyus sp
Références et définitions
[1] Gauld, I.D. (2002). The family Ichneumonidae. In : Gauld, I., Godoy,C., Ugalde, J. & Sithole, R. The Ichneumonidae of Costa Rica, 4. Memoirs of the American Entomological Institute, 66 : 1-768.
[2] Gauld I. D. (1988). Evolutionary patterns of host utilization by ichneumonoid parasitoids (Hymenoptera : Ichneumonidae and Braconidae). Biological Journal of the Linnean Society, 35(4), 351-377.
[3] Un très bon résumé de la bibliographie sur la biologie des Ichneumonidae est disponible en anglais sur le site de l’Institut Américain d’Entomologie
[4] D’après certains auteurs, elle ne servirait cependant qu’à la fixation du fourreau ou pour indiquer que le fourreau est déjà parasité, voir Grenier (1970) p347.
[5] Elliott J. M. (1982). The life cycle and spatial distribution of the aquatic parasitoid Agriotypus armatus (Hymenoptera : Agriotypidae) and its caddis host Silo pallipes (Trichoptera : Goeridae). The Journal of Animal Ecology, 923-941.
[6] Grenier S. (1970). Biologie d’Agriotypus armatus Curtis (Hymenoptera : Agriotypidae), parasite de nymphes de Trichopteres. In Annales de Limnologie, 6(3) 317:361. EDP Sciences.
[7] Resh V.H. & Jamieson W. (1988.) Parasitism of the aquatic moth Petrophila confusalis (Lepidoptera : Pyralidae) by the aquatic wasp Tanychela pilosa (Hymenoptera : Ichneumonidae). Entomological News, 99 : 185-188.
[8] Veijalaine, A., Wahlberg N., Broad G. R., Erwin T. L., Longino J. T. & Sääksjärvi I. E. (2012). Unprecedented ichneumonid parasitoid wasp diversity in tropical forests. Proceedings of the Royal Society of London B : Biological Sciences, 279(1748), 4694-4698.
[9] Identification J.Valemberg, Société Entomologique du Nord de la France.
[10] Identification J.Valemberg.
[11] Identification J.Valemberg.
[12] Identification M. Schwarz via A. Ramel.
[13] Hächler M. (1992). The turnip moth Agrotis segetum D. & Sch.(Lepidoptera, Noctuidae), pest of large-scale cultivation and market gardening. Observations in French-speaking Switzerland. Revue Suisse de Viticulture, d’Arboriculture et d’Horticulture, 24(5), 261-267.
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Forum
- Les Ichneumons, famille des Ichneumonidae18 juin 2019, par Guy
Bonjour
Je pense avoir des
Ichneumon crasdifemur dans la maison depuis quelques jours
Je me demande si elles ont un dart ou pas
Et si c’est dangereux pour mes chiens si jamais il en atrappe une et l’avaler
Merci de me répondre
Bonne soirée- Les Ichneumons, famille des Ichneumonidae20 juin 2019,par La fourmi
Bonjour,
c’est difficile à dire. Dans tous les cas le mieux est de les relâcher dehors en utilisant une boite et une feuille de papier à glisser entre la boîte et la vitre. Les insecticides et répulsifs ne marchent pas et pourraient dangereux pour vous et vos chiens...
Bien cordialement