La chenille processionnaire du pin

Insecta ; Lepidoptera ; Notodontidae ; Thaumetopoea pityocampa

Où vit la chenille processionnaire du pin en France ?

La chenille processionnaire du pin (Thaumetopoea pityocampa) est présente dans toute la moitié Sud de la France, là où elle peut trouver des pins et des cèdres dont elle se nourrit. Elle était auparavant exclue des zones montagneuses et du nord de la France, mais à cause du réchauffement climatique les barrières de sa progression ont été repoussées et toutes les prévisions s’accordent sur le [1] fait que la chenille processionnaire sera bientôt présente dans toute la France. La chenille processionnaire du pin a déjà été observée en Île de France, dans le Val-de-Marne notamment et elle est présente dans le Rhône. On la trouve aussi en au Maroc, en Espagne, en Italie, en Suisse, mais elle n’est a priori pas encore présente ni en Belgique ni au Canada.

Photo d’un "cocon" ou nid de soie de chenilles processionnaires du pin, dans un arbre :

Photographie d'un cocon de soie, un nid abritant des chenilles processionnaires du pin, sur une branche de pin noir. Photographié en montagne, dans le massif du Queyras, dans les Hautes-Alpes.
Nid (cocon de soie) de chenilles processionnaires du pin

Vidéo de l’ouverture d’un nid de chenilles processionnaires du pin :

Sur quels arbres trouve-t-on la chenille processionnaire ?

La chenille processionnaire du pin s’attaque à différentes espèces d’arbres, dont le pin d’Alep (Pinus halepensis), le pin maritime (Pinus pinaster), le pin noir d’Autriche ou pin noir (Pinus nigra), le pin blanc ou pin de Weymouth (Pinus strobus), le pin laricio de Corse et le pin laricio de Calabre (Pinus nigra var. corsicana) et le pin sylvestre (Pinus sylvestris) [2], ainsi que le Mélèze d’Europe ou Mélèze Commun (Larix decidua) [3] Les chenilles processionnaires s’attaquent aussi, mais plus rarement, au pin parasol (Pinus pinea) [4] et aux cèdres [5].

Comment reconnaitre les chenilles processionnaires du pin ?

De nombreuses chenilles se trouvent en grand nombre, amassées aux branches de certaines plantes, comme la chenille processionnaire du chêne, T. processionea que l’on rencontre sur les chênes, mais aussi comme la chenille du Paon du jour (Aglais io ou Inachis io), toute noire, qui vit sur les orties.
La chenille processionnaire du pin se nourrit uniquement sur les résineux, forme des boules de soies dans les arbres qu’elle occupe et se déplace en processions. Elle est de couleur brune ou orange avec de longs poils blancs (on parle en réalité de soies chez les insectes).

Photo d’un nid ou "cocon" de chenilles processionnaires ouvert en hiver, dans les Alpes :

Macrophotographie de chenilles processionnaires du pin, accompagnées de leurs exuvies, dans leur cocon de soie sur une branche de pin noir. Guillestre, Alpes.
Cocon de soie et chenilles processionnaires du pin

Quel est le cycle de vie de la chenille processionnaire du pin ?

En été, les papillons émergent de leur chrysalide, s’accouplent et pondent immédiatement leurs oeufs sur leurs plantes hôtes comme le pin noir ou le cèdre. Les oeufs éclosent rapidement et les jeunes chenilles tissent des nids provisoires dans lesquelles elles commencent à se nourrir. Après parfois plusieurs changements, elles tissent un nid définitif au bout d’une branche. Ce nid est épais et les protèges des intempéries (froid, vent, pluie) et des prédateurs durant tout l’hiver. Tant que la température leur permet, elles continuent de s’alimenter. Au printemps, dès que les températures le permettent, elles forment de longues processions le long des arbres et sur le sol, se suivant jusqu’à ce qu’elles trouvent un endroit idéal pour s’enterrer et former leurs chrysalides dans le sol. Les chenilles processionnaires se transforment en nymphes lorsqu’elles sont à l’intérieur des chrysalides, puis s’envolent en été et le cycle recommence.

En fonction de la température et du nombre de jour où il fait chaud, les chenilles se nourrissent plus ou moins rapidement. Dans les régions où les températures sont clémentes, ou durant les années où les moyennes de températures sont plus élevées, les chenilles forment des processions plus tôt dans l’année et peuvent s’enterrer durant l’hiver.

Les chenilles ne peuvent pas survivre à des températures inférieures à -16°c, ce qui explique qu’elles aient mis du temps à coloniser le nord de la France et les montagnes françaises. Avec le réchauffement climatique, l’avancée des chenilles processionnaires a été rendue possible dans toute la France. Elles colonisent au fur et à mesure de leurs avancées des milieux soumis à des microclimats particuliers, où elles sont à l’abri des hivers les plus froids. Lorsque l’été revient, les papillons ayant survécu dans ces zones où les températures ne descendent pas en dessous de -16°c recolonisent rapidement les alentours.

Sur cette photo, on voit que le nid de soie des chenilles processionnaires est très robuste et très épais :

Photographie de l'ouverture d'un nid de chenilles processionnaires du pin. La soie composant le cocon fixé à cettre branche de pin a été découpée puis écartée, révélant la présence de plusieurs chenilles, de leurs exuvies et excréments.
Nid de chenilles processionnaires du pin

Comment se débarrasser des nids de chenilles processionnaires du pin ?

Dans tous les cas, si vous n’êtes pas sur de ce que vous faites, demandez l’intervention d’un jardinier professionnel qui possèdera l’équipement nécessaire pour se protéger correctement. Les poils urticants de la chenille processionnaire se détachent et son dispersés par le vent, il n’est donc pas nécessaire de toucher directement les chenilles pour que vous développiez une réaction allergique (voir les différents symptômes plus bas).

Si vous avez des chenilles processionnaires sur un arbre, pour vous en débarrasser, armez-vous de gants, de lunettes, d’un masque et d’un sécateur. Coupez la branche sur laquelle se trouve le nid, en prenant soin de garder une longueur de branche suffisante pour saisir la branche à bonne distance du nid. Enfermez immédiatement le ou les nids dans un sac hermétique. Une autre solution est de bruler le nid à l’aide d’un chalumeau, en prenant d’infinies précautions pour ne pas déclencher un incendie (ne pas appliquer cette méthode dans le Sud de la France, ni par temps sec et venteux, et toujours s’équiper d’un extincteur).

Si vous avez des chenilles processionnaires sur de nombreux arbres...

Il est possible de piéger les chenilles lorsqu’elles descendent de l’arbre, à l’aide de pièges mécaniques "bio" appelés gouttières écopièges. Comme par exemple ces gouttières de piégeage de chenilles processionnaires du pin (lien affilié). Le piège est formé d’une sorte de gouttière ceinturant l’arbre. La seule ouverture vers le bas est un tuyau qui mène vers un sac. Le sac contient un substrat dans lequel les chenilles, se croyant enterrées, se transforment en chrysalide et restent piégées. Les sacs doivent être posés au mois de Novembre avant les premières processions, puis retirés, détruits et remplacés au mois Avril, avant l’émergence des papillons. Cette méthode tue donc les chenilles qui donneraient des papillons à la génération suivante, et il faut un peu de patiente pour en voir les résultats.

Photo d'un piège à chenille processionnaire du pin. Fixée sur un pin, une gouttière transparente dirige les chenilles vers un conteneur rempli de terre où les chenilles resteront bloquées.
Piège à chenille processionnaire du pin

L’Institut National de la Recherche en Agronomie recommande aussi l’installation de plusieurs nichoirs à mésanges (lien affilié) sur les pins. Les mésanges sont des prédateurs très efficaces de la chenille processionnaire du pin. Une mésange pourrait consommer jusqu’à 40 chenilles par jour, en se servant directement dans le cocon de soie [1]. Les nichoirs peuvent être fabriqués facilement et installés en hauteur directement dans les pins. Au printemps, les mésanges se mettent à la recherche de chenilles pour nourrir leurs oisillons et peuvent avoir un impact important sur les populations de chenilles.

A l’échelle de la forêt, comment lutter contre la chenille processionnaire du pin ?

A large échelle, la lutte est plus difficile. Il est cependant possible d’installer des pièges à phéromones : dans des boites ouvertes sur les côtés, des phéromones synthétiques du papillon femelle de la chenille processionnaire sont libérées. L’intérieur de la boite est recouvert de résine collante. Lorsque les mâles attirés par les phéromones rentrent dans la boite, ils meurent collés. A large échelle, il est possible que cette technique limite la densité de chenilles processionnaire, à défaut de l’éliminer complètement. Ce piège n’est efficace que sur les papillons, et donc en été et en automne.
Les sylviculteurs utilisent également des traitements biologiques comme Bacillus thuringiensis ssp. kurstaki, un bacille (sorte de bactérie) qui, une fois ingéré par les chenilles, produit une substance toxique pour les insectes. Ce traitement n’est cependant pas sélectif, car il tue aussi d’autres espèces d’insectes. Peu de cas d’infections d’humains par ce bacille sont connus, mais la prudence reste de mise lors de son utilisation [6], d’autant plus que de nouvelles souches sont produites et mises sur le marché régulièrement [7]. Les traitements chimiques sont à déconseiller en raison de leur impact sur la santé humaine, sur l’environnement, et en particulier sur les abeilles et autres insectes auxiliaires des cultures.
Il existe également des espèces de mouches parasites des chenilles processionnaires du pin, et en particulier les espèces de mouches de la famille des Tachinidae comme Phryxe caudata [8], Compsilura concinnata, Pales processionea et Carcelia ilaca, ainsi que de nombreux hyménoptères parasitoïdes des oeufs de ces chenilles [9]. Les mésanges, les fourmis d’Argentine et les éphippigeres seraient également des prédateurs naturels de la chenille processionnaire du pin [5].

Photographie macro d'un groupe de chenilles processionnaires du pin regroupées dans leur cocon de soie fixé à une branche d'un pin noir. Photo prise à Guillestre, Queyras, Hautes-Alpes.
Chenilles processionnaires du pin dans leur nid de soie

Quels sont les risques pour la santé liés à la chenille processionnaire ?

Les poils de la chenille processionnaire peuvent être particulièrement irritants s’ils entrent en contact avec les yeux ou les muqueuses. Certaines personnes allergiques réagissent dès le contact avec la peau. Les poils urticants provoquent alors des réactions allergiques sous la forme de plaques rouges, de boutons parfois associés à une sensation de brûlure ou à des démangeaisons. Prenez rapidement rendez-vous chez un médecin pour suivre l’évolution des symptômes et prévenir tout risque d’infection.

Dans de rares cas les chenilles processionnaires seraient susceptibles de provoquer des oedèmes (particulièrement dangereux s’ils ont lieu au niveau des voies respiratoires, ils sont alors liés à un risque d’étouffement) ou des chocs anaphylactiques [10]. En cas de réaction allergique grave, contactez immédiatement les secours (numéro 112 dans toute l’Europe).

Les chenilles processionnaires du pin peuvent entraîner des symptômes similaires les chiens et les chevaux, qu’il convient d’emmener rapidement chez le vétérinaire pour éviter des complications, en particulier au niveau de la truffe et de la langue chez les chiens.


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Notes et références

[1"Processionnaire du pin : une chenille sous haute surveillance." INRA.

[2Hadar, J. A., Castro, J., & Zamora, R. (2003). Pine processionary caterpillar Thaumetopoea pityocampa as a new threat for relict Mediterranean Scots pine forests under climatic warming. Biological Conservation, 110(1), 123-129.

[3Korsch, K., Bataka, A., Kodona, M., Sioulas, S., Tsiakiris, R., Michaelakis, A., & Avtzis, D. N. (2015). Genetic diversity of Thaumetopoea pityocampa in Greece : the role of Quaternary changes in Aegean Sea. Open Life Sciences, 10(1).

[4Hadar, J. A., Zamora, R., & Castro, J. (2002). Host utilisation by moth and larval survival of pine processionary caterpillar Thaumetopoea pityocampa in relation to food quality in three Pinus species. Ecological Entomology, 27(3), 292-301.

[5Fraval A. (2007). Les Processionnaires - 1ère partie : La Processionnaire du pin. Insectes n°147(4), 5p.

[6Siegel, J. P. (2001). The mammalian safety of Bacillus thuringiensis-based insecticides. Journal of invertebrate pathology, 77(1), 13-21.

[7McClintock, J. T., Schaffer, C. R., & Sjoblad, R. D. (1995). A comparative review of the mammalian toxicity of Bacillus thuringiensis-based pesticides. Pesticide Science, 45(2), 95-105.

[8Biliotti, E. (1956). Biologie de Phryxe caudata Rondani (Dipt. Larvaevoridae) parasite de la processionnaire du pin (Thaumetopoea pityocampa Schiff). Revue de Pathologie Végétale et Entomologie Agricole de France, 35, 50-65.

[9Tiberi, R. (1990). Egg parasitoids of the pine processionary caterpillar, Thaumetopoea pityocampa (Den. & Schiff.)(Lep., Thaumetopoeidae) in Italy : distribution and activity in different areas1. Journal of applied entomology, 110, 14-18.

[10Vega, J. M., Moneo, I., Armentia, A., Fernandez, A., Vega, J., De La Fuente, R., ... & Sanchis, M. E. (1999). Allergy to the pine processionary caterpillar (Thaumetopoea pityocampa). Clinical and experimental Allergy, 29, 1418-1423.



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