Comment construire le meilleur hôtel à insectes

Il peut être difficile d’attirer des insectes dans un hotel à insectes, alors cet article est destiné à couvrir tous les aspects de la biologie des insectes qui peuvent être accueillis dans un hôtel à insectes pour augmenter vos chances de réussir à attirer abeilles, coccinelles, chrysopes et autres insectes utiles au jardin. Il vous aidera à construire un meilleur hôtel à insecte, et à vous assurez que vos efforts soient récompensés.

Pourquoi avoir un hôtel à insectes ?

Avoir un hôtel à insecte est un atout essentiel au jardin. Nos jardins modernes ont malheureusement été très épurés, et ne permettent souvent pas aux insectes d’y faire leurs nids. Idéalement, il faut laisser des herbes hautes, des tas de branches et des arbres morts pour fournir des lieux de nidification naturels pour les insectes. Souvent malheureusement, ce n’est pas possible, surtout dans les petits jardins. Le rôle d’un hôtel à insectes est alors de fournir un habitat alternatif aux insectes bénéfiques au jardin. Les hôtels à insectes permettent d’abriter des insectes pollinisateurs, ainsi que d’autres insectes auxiliaires qui contrôlent naturellement les populations de certains insectes ravageurs comme les chenilles ou les pucerons. Les hôtels à insectes sont principalement faits pour abriter des abeilles solitaires. Ils peuvent aussi être aménagés pour abriter des coccinelles, des syrphes et de petites guêpes solitaires inoffensives qui défendent le jardin contre les insectes mangeurs de plantes. Un hôtel à insectes de moyenne taille peut abriter des dizaines d’espèces d’insectes bénéfiques au jardin, même en ville !

Les hôtels à insectes sont particulièrement utiles aux jardiniers qui ont des arbres à floraison précoce, comme les cerisier. En effet, les hôtels à insectes abritent très souvent des osmies, de jolies abeilles solitaires de moyenne taille qui sortent au printemps dès que les cerisiers sont en fleur. Les osmies peuvent polliniser les plantes à des températures relativement basses, ce qui signifie qu’elles peuvent polliniser les cerisiers lorsque les abeilles sociales n’osent pas encore sortir.

Les hôtels à insectes permettent aussi d’abriter certaines espèces d’abeilles qui pollinisent mieux certaines plantes que les abeilles sociales. Par exemple, il est possible d’abriter des mégachilles (abeilles coupeuses de feuilles) qui pollinisent très bien les pois. Et des abris peuvent être mis en place pour abriter les bourdons, qui pollinisent les fleurs même quand les températures sont basses, et sont de très bon pollinisateurs des solanacées comme les tomates et les pommes de terre. Les bourdons peuvent faire vibrer ces fleurs pour récupérer le pollen de ces plantes, comme les Amegilla aussi appelés abeilles à bandes bleues que l’on peut voir sur la vidéo ci-dessous :

En hiver, les hôtels à insectes peuvent aussi abriter des coccinelles et des syrphes. Ces insectes se nourrissent principalement de pucerons et de cochenilles, et les abriter dans son jardin permet d’assurer un contrôle rapide, au printemps, des populations de pucerons. Les hôtels à insectes placés au potager fournissent aux syrphes un abris pour pondre leurs oeufs qui doivent généralement être gardés au sec avant qu’ils n’éclosent.

Enfin, les hôtels à insectes sont bénéfiques à tous ces insectes, qui ne trouvent pas forcément où nicher dans les villes. En effet, dans la nature, la plupart de ces insectes ont besoin d’arbres morts. Les abeilles et guêpes solitaires en particulier nichent souvent dans des trous creusés par des coléoptères xylophages dans les arbres morts. Mais dans les villes, ces arbres sont coupés pour éviter qu’ils ne tombent sur des habitations ou des voitures. Les hôtels à insectes fournissent donc aux insectes une alternative aux arbres morts.

Différents hôtels à insectes pour les différents animaux du jardin

Tous les insectes du jardin n’ont pas les mêmes besoins pour s’abriter. Un hôtel à insectes efficace combine donc différentes approches, et peut être complémenté par d’autres petits abris disséminés dans le jardin pour abriter d’autres espèces d’abeilles et de bourdons qui nichent dans le sol.

Voici les grandes catégories d’abris à insectes :

• buches percées, tiges creuses et tubes. Ces hôtels abritent certaines abeilles solitaires et guêpes solitaires, dont les osmies (abeilles maçonnes), les mégachilles (abeilles coupeuses de feuilles), les guêpes chasseuses de pucerons, les guêpes chasseuses de sauterelles, Les xylocopes ou grandes abeilles bleues, les chrysides,...
• pommes de pin, cartons empilés, planches avec interstices, paille. Ces hôtels abritent des chrysopes,des coccinelles et des perce-oreilles inoffensifs, qui se nourrissent de cochenilles et pucerons.

  

• Murs d’argiles et murs de briques avec des interstices. Ces hôtels abritent différentes espèces de petites abeilles et guêpes solitaires auxiliaires du jardin, dont les pompiles et parfois des mégachiles. Ils fournissent aussi des matériaux de construction pour les autres guêpes potières et abeilles maçonnes.
• Boîte sèche ou espace sous toit sec. Ils abritent des araignées qui peuvent aider à protéger les fruits des carpocapse et autres papillons de nuits qui attaquent les fruits. Ils fournissent aussi des abris aux guêpes potières et aux oeufs des chrysopes.

  

• Sols nus. S’ils sont sableux, ils peuvent abriter les guêpes fouisseuses comme la philanthe apivore. S’ils sont argileux, ils peuvent abriter des abeilles solitaires comme les andrènes et les halictes, et les guêpes coucous (qui parasitent les abeilles mais pollinisent aussi les fleurs !).
• Pots de fleurs renversés, boîtes enterrées. Ils peuvent abriter des nids de bourdons, mais attention à les placer à endroit où vous ne marchez jamais pied nu ! Le taux de réussite est faible pour ces abris à bourdons, et il faudra vous armer de patience ou en placer plusieurs pour augmenter vos chances.

Faut-il acheter son abris à insecte où le faire soi-même ? Où acheter un abri à insectes ?

Les hôtels à insectes sont devenus très populaires dans les jardins. Il est maintenant possible de les trouver à la vente dans de nombreux magasins comme botanic, truffaut, gamm vert, jardiland, leroy merlin, brico-dépôt, castorama et même nature et découverte. Cependant, la plupart de ces magasins vendent de très petits mini hôtels à insectes et il est plus difficile d’en trouver des grands. Les petits hôtels à insectes n’attirent souvent pas les insectes car les cavités sont trop peu profondes. Les prix des hôtels à insectes peuvent aussi être assez élevés, même si cela est souvent justifié par le coût de leur belle finition qui en fait souvent aussi des objects de décoration. On peut également acheter des hôtels à insectes en kits dans certains magasins, en "diy" c’est à dire à construire soi-même. Attention à en sélectionner un de taille suffisante, avec des creux d’au moins 15cm de profondeur pour les trous de plus grand diamètre.

Voici des exemples de mauvais hôtels à insectes. Les tiges sont trop courtes, ils sont mal attachés (souvent par une ficelle, donc l’abri bouge ce que les abeilles n’aiment pas du tout), toutes les cavités ont le même diamètre et ils ont peu de protection contre la pluie :

Au contraire, les abris faits maison ne coûtent souvent que quelques clous ou un peu de fil de fer, des tiges creuses ou une bûche. Mais ils demandent un peu d’effort.

Comment faire un abri à insectes ?

La fabrication d’un hôtel à insectes nécessite l’utilisation d’outils coupants, perforants et parfois bruyant. Assurez-vous d’être correctement équipés (gants, lunettes, protection auditives) avant de démarrer.

Les dimensions peuvent être variées, le nombre de cavités n’est pas très important mais faire un abri stable, protégé de la pluie, et avec des cavités assez profondes (au moins 15cm pour les trous de diamètre 10mm) est ce qui garantira votre succès. Pour ce qui est des modèles, vous pouvez voir des examples plus bas, mais n’importe quel agencement fera l’affaire. Alors faites marcher votre imagination ou improvisez pour utiliser les matériaux recyclés empilés depuis trop longtemps au fond de votre garage ! Pour les espaces publics, il peut être nécessaire d’installer un grillage pour éviter que l’abri ne soit vandalisé. C’est pour cela que de nombreux abris en photo dans cet article ont des grillages.

Principalement, il vous faut donc un simple objet carré ou rond pour protéger des tiges creuses, bûches percées et d’autres matériaux. Cela peut être une boîte en bois, une bouteille en plastique coupée, un parpaing ou n’importe quelle structure creuse en béton ou en bois. Une fois que vous avez trouvé ou fabriqué ça voici comment remplir votre abri à insectes :

Les abris en tiges creuses
Ce sont les hôtels à insectes les plus simples et les plus faciles à construire : de simples tiges creuses empilées et solidement attachées ensemble et protégées de la pluie par un toit. Ils attirent généralement de petites abeilles et des chrysides. Pour ces abris, vous n’aurez besoin que d’un sécateur. Pour protéger l’abri de la pluie, si vous n’avez pas de quoi fabriquer un toit en bois ou en pierre, vous pouvez couper de grandes bouteilles en plastique et placer les tiges à l’intérieur. Pas forcément besoin de bamboo non plus : il existe de nombreuses plantes arbustives sauvages qui possèdent des tiges creuses. Vous pouvez même joindre l’utile à l’agréable car de nombreuses plantes invasives en France ont des tiges creuses qui peuvent abriter les abeilles.
Si vous avez des bambous dans votre jardin, prélevez quelques tiges de différentes diamètres (entre 2 et 10mm). Coupez des sections de 20cm de longueur, essayez de couper de manière à ce qu’il n’y ait pas de noeud à l’avant et qu’il y ait une noeud à l’arrière. Les noeuds des tiges de bamboos ne sont pas creux et les abeilles ne pourront pas y passer.
Si vous n’avez pas de bambous, voici quelques plantes que vous pouvez récolter autour de chez vous. Privilégiez les branches déjà sèches, mais vous pouvez aussi récolter des branches vivantes et les laisser sécher. N’oubliez pas de mettre vos gants pour vous protéger des épines, des feuilles parfois coupantes, des allergies et du sécateur. Coupez des segments d’environs 20cm de longeur.

• La renouée du japon (Fallopia japonica) : cette plante invasive pousse le long des cours d’eau, elle possède des tiges creuses de différents diamètres.
• Le roseau commun (Phragmites australis), la canne à sucre sauvage (Saccharum spontaneum) : ces plantes sont parfois considérées comme invasives, parfois comme cosmopolites. Elles poussent le long des mares et lacs, elles possèdent généralement de longues tiges de différents diamètres. Les feuilles sont parfois coupantes.
• La canne de Provence (Arundo donax) : cette plante est parfois considérée comme invasive, son origine n’a pas était clairement déterminée. Elle pousse en zone méditerranéenne dans des lieux humides. Elle fait des tiges de la diamètre large. Les feuilles peuvent être coupantes.
• Le sureau noir (Sambucus nigra). Cette plante se trouve en bordure de forêt. Les tiges sèches, de différents diamètres, restent généralement sur l’arbre. Les tiges contiennent une pulpe fragile qui peut être laissée dans la tige, car les abeilles qui habitent les tiges de sureau peuvent l’enlever elles-mêmes.
• Les ronces (Rubus fruticosus,...). Ces plantes se trouvent sur les friches ou en bordure de forêt. Les tiges sont évidemment épineuses et les épines sont plus faciles à retirer des tiges encore vertes.
• L’ailante (Ailanthus altissima). Cet arbuste invasif pousse sur les terrains vagues dans les endroits chauds, très présent en ville dans les friches. Les jeunes tiges sont creuses.

  

Un abri à insectes fait de tiges creuses sera plus joli si les tiges sont exactement de la même longueur. Utilisez une tige de 20cm comme guide pour couper les autres à la même longueur. Regroupez ensuite les tiges dans un abri en bois, en pierre ou en plastique placé en hauteur. Si vous n’avez pas de quoi fabriquer une petite maison en bois, le plus simple est d’utiliser de grandes bouteilles en plastique dont vous pouvez couper le haut et le bas. Tassez et serrez les tiges autant que possible, car les abeilles n’aiment pas les tiges qui bougent !

Les abris à insectes faits de bûches ou de planches
Ce sont les abris les plus efficaces pour attirer les osmies, mais ils nécessitent une perceuse et des mèches longues. Pour celui-ci, vous aurez besoin d’une perceuse, de mèches de différentes diamètres et de longueur idéalement de 15cm, de petits buches de 20cm de longueur et d’au moins 10cm de diamètre. Vous pouvez remplacer les buches ou rondins de bois par des planches non traitées collées entre elles, mais faites attention à ne pas laisser de fissures ou d’espaces entre les planches. Une fois l’équipement regroupé, vous n’avez plus qu’à percer des trous. Idéalement et pour abriter le plus d’espèces d’abeilles possible, percez des trous différents diamètres, entre 2mm et 10mm. Si vous souhaitez attirer principalement des osmies, pour la pollinisation des cerisiers par exemple, vous pouvez vous concentrer sur des diamètres de 5 à 8mm. Utilisez de préférence des mèches de 15cm de longueur, les trous plus courts semblent augmenter la proportion d’osmies mâles (et pour établir une population d’osmies, il est important d’avoir aussi des femelles !) [1].

Les abris à bourdons
Ce sont des abris spéciaux qui imitent les nids des petits rongeurs, que les bourdons utilisent pour nicher dans la nature. Il vous faudra une pelle, un pot en terre de 25cm de diamètre, une tuile ou une pierre plate, de la paille et de la mousse sèche et quelques petits cailloux. Pensez à mettre une pancarte au-dessus de l’abris !

Creusez un trou de même profondeur que la hauteur du pot en terre. Placez quelques centimètres de paille et de mousse au fond du trou puis placez votre pot en terre à l’envers dans le trou. Le fond du pot en terre doit affleurer la surface du sol. Remplissez les espaces autour du pot avec de la terre, de manière à ce que seul le fond du pot soit visible. Le fond du pot doit avoir une ouverture de 2cm. Placez des petites pierre de 3-4cm d’épaisseur d’un côté du pot, puis recouvrez l’entrée d’une pierre plate ou d’une tuile pour protéger le pot de la pluie. Stabilisez là avec une brique ou une grosse pierre.

Pour les abris à bourdons, le principe est toujours le même : créer une cavité abritée de la pluie avec un faible volume que l’on remplis de mousse ou de paille. Le plus important est de placer ces abris dans des lieux abrités et au niveau ou sous le niveau du sol.

Ces abris ont un très faible taux de réussite (environs 1,5% ! [2]), alors ne vous découragez pas et continuer d’en ajouter chaque année. N’oubliez pas que les bourdons piquent, et il ne faut donc pas déranger les nids. Pour s’avoir s’ils sont occupés, observez simplement en été si vous voyez des bourdons y rentrer. Les nids ne doivent pas être placés là où vous marchez pieds nus ou aux endroits où des enfants jouent. Placer une petite pancarte avec marqué "Attention, bourdons" est généralement une bonne idée.

Les abris à syrphes, coccinelles et perce-oreilles en carton ou planches superposées
Ces abris créent de petits espaces où les syrphes, coccinelles et perce-oreilles (tous des mangeurs de pucerons !) peuvent s’abriter en particulier en hiver. On les voit souvent faits de pommes de pins, mais à ma connaissance les abris à insectes en pomme de pin sont peu efficace. Les abris les plus efficaces pour ces insectes sont faits de boites contenant de la paille, de planches de bois espacées de quelques millimètres, ou de multiples couches de carton ondulé.
Sur les arbres, des pots en terre retournés et remplis de paille peuvent abriter ces insectes.

Où placer son abri à insectes ? Comment attirer les insectes dans un hôtel à insectes ?

Choisir le bon emplacement pour son abri à insectes est le meilleur moyen d’attirer les insectes. Le plus important est de positionner l’abri à insectes de manière à ce qu’il ne bouge pas, en particulier s’il y a du vent. Mieux vaut donc l’attacher solidement à un mur de votre maison ou de votre appartement. L’abri ne devrait pas bouger, et les tiges à l’intérieur non plus. À l’installation, prévoyez donc plusieurs points d’ancrage.

Les endroits abrités, sous un toit de la maison par exemple, sont un plus. Les abeilles préfèrent les abris secs, en particulier les abeilles maçonnes qui ne veulent pas que leurs constructions s’effondrent ! L’abri à insectes devrait être placé le plus à l’abri du vent. Il est plus difficile pour les abeilles de rentrer dans leur abri si le vent souffle fort à l’endroit où l’hôtel à insectes est placé.

Si votre hôtel à insectes est grand, avec de nombreux trous ou brindilles, il est important de donner aux abeilles des repères pour qu’elles puissent facilement retrouver l’entrée. Les abeilles femelles font des dizaines d’allers et retours pour transporter de la nourriture, des matériaux de construction, et garder leur nid. S’il y a beaucoup de trous de la même taille, il est possible qu’elle ne puisse pas facilement retrouver leur nid et pourraient même l’abandonner. Pour donner des repères aux abeilles, vous pouvez peindre les ruches ou les bouts des tiges avec des motifs et des couleurs différentes. Attention à ne pas trop en faire non plus, car trop de détails pourrait aussi compliquer la tâche aux abeilles !

Pour attirer les insectes dans l’hôtel, il n’est pas utile d’essayer de les attirer avec de la nourriture. Les insectes trouveront tout seul votre abri avec le temps.

Pour résumer donc, le meilleur emplacement est un lieu stable, protégé de la pluie et du vent, et avec des repères visuels simples. Fournir aux abeilles un abri qui répond à ces critères est le meilleur moyen de les attirer dans votre hôtel à insectes !

Quand faut-il installer un hôtel à insectes ? Quelle est la meilleure saison pour faire un hôtel à insectes ?

Le meilleur moment pour établir un hôtel à insectes est de l’installer... dès que possible. Il existe de nombreuses espèces d’insectes qui nichent dans ces abris, et l’hôtel est donc susceptible d’accueillir de nouveaux insectes toute l’année. En hiver, il y a moins d’insectes, mais c’est tôt au printemps que les premières osmies cherchent où nicher. Installer l’hôtel en hiver augmentera donc vos chances d’y abriter des osmies dès les premiers beaux jours du printemps !

[1] Gruber, B., Eckel, K., Everaars, J., & Dormann, C. F. (2011). On managing the red mason bee (Osmia bicornis) in apple orchards. Apidologie, 42(5), 564-576.

[2] Fussell, M., & Corbet, S. A. (1992). The nesting places of some British bumble bees. Journal of Apicultural Research, 31(1), 32-41.